L’utilisation de la clause compromissoire dans les contrats d’affaires

Une clause compromissoire est une clause insérée dans un contrat qui permet de soustraire les litiges nés de ce dernier à la décision des tribunaux étatiques pour les soumettre à la décision d’un ou plusieurs arbitres désignés préalablement par les parties. À défaut d’insérer une clause compromissoire dans le contrat, les parties peuvent également décider de conclure une convention d’arbitrage indépendante, même a posteriori de la survenance du litige.

En droit interne, l’arbitrage est réglementé par la Loi sur l’Arbitrage 60/2003 qui remplace et modernise la précédente Loi sur l’Arbitrage 36/1988. Cette évolution législative s’inscrit dans la nécessité d’aligner les normes arbitrales espagnoles sur la Loi type CNUDCI sur l’arbitrage commercial international qui harmonise le droit de l’arbitrage à l’international.

Le tribunal arbitral qui sera chargé de rendre une décision sur l’objet du litige est composé d’arbitres choisis par les parties. Les parties ont la possibilité de désigner un ou plusieurs arbitres, toutefois ce nombre doit toujours être impair. En vertu de l’article 13 de la Loi sur l’Arbitrage 60/2003, la mission d’arbitre ne peut être exercée que par des personnes physiques jouissant du plein exercice de leurs droits.

Les arbitres désignés par la clause compromissoire rendent une décision appelée sentence arbitrale qui, une fois rendue, a autorité de chose jugée. Les sentences arbitrales sont donc directement exécutoires et elles ne peuvent être annulées que dans des cas limitativement énumérés par la Loi sur l’Arbitrage 60/2003.

Validité de la clause compromissoire

La validité de la clause compromissoire repose sur un certain nombre de conditions qui ne sont toutefois pas empreintes d’un grand formalisme.

La clause compromissoire n’a ainsi pas à respecter de nombreuses règles de forme. Il suffit qu’elle soit écrite (article 9.3 de la Loi 60/2003). Cette absence de formalisme strict permet une grande flexibilité et un important gain de temps.

La validité d’une clause compromissoire repose en effet principalement sur la libre volonté des parties (article 9.1 de la Loi 60/2003). Ainsi, si les parties sont libres d’insérer ou non une clause compromissoire au contrat, cette liberté s’entend aussi, entre autres, de la désignation ou de la récusation des arbitres, de la détermination du lieu ou encore de la langue dans laquelle l’arbitrage sera mis en place. Le Tribunal Supérieur de Madrid interprète d’ailleurs assez largement la volonté des parties de se soumettre à l’arbitrage. Il a ainsi reconnu dans sa décision n°17/2018 que la clause par laquelle les parties décident de soumettre toute difficulté pouvant survenir entre elles à un arbitre et, en dernier recours, aux tribunaux et juridictions de Madrid indique clairement la volonté des parties de recourir à l’arbitrage.

Enfin, il existe des situations dans lesquelles le recours à l’arbitrage est formellement interdit. Tel est le cas notamment des matières qui seraient illicites et dont on ne peut pas librement disposer.

Utilité de la clause compromissoire

Afin d’apprécier l’opportunité de l’insertion d’une clause compromissoire dans un contrat d’affaires, encore faut-il en connaître les avantages et les inconvénients.

Les avantages du recours à l’arbitrage sont multiples :

  • La procédure arbitrale est plus rapide que la procédure de droit commun. L’article 37.2 de la Loi 60/2003 oblige d’ailleurs les arbitres à rendre leur sentence arbitrale dans un délai maximum de 6 mois
  • La procédure arbitrale permet de réduire l’hostilité entre les parties et d’instaurer un dialogue qu’il n’y aurait pas forcément dans les procédures judiciaires de droit commun. Par conséquent, le recours à l’arbitrage contribue au maintien des relations entre les parties
  • Le litige est résolu par des arbitres spécifiquement désignés par les parties. En matière d’arbitrage, les litiges ne sont pas jugés par des juges fonctionnaires, mais par des arbitres qui ont des connaissances et des compétences spécifiques dans la matière faisant objet de l’arbitrage
  • Le processus arbitral se caractérise enfin par sa discrétion du fait de sa nature confidentielle. L’obligation de confidentialité est prévue à l’article 34 de la Loi 60/2003 qui dispose que les parties et les institutions arbitrales ont interdiction de révéler des informations concernant des éléments ayant fait l’objet d’une procédure arbitrale
  • Enfin, le coût d’une procédure arbitrale peut sembler plus élevé à première vue étant donné qu’il convient de rémunérer les arbitres. Or, en tenant compte du fait que les procédures arbitrales durent beaucoup moins longtemps que les procédures de droit commun, in fine, il est beaucoup plus économique de recourir à l’arbitrage.

Le recours à l’insertion d’une clause compromissoire dans un contrat n’est cependant pas exempt d’effets négatifs :

  • L’arbitrage peut être pointé du point pour son manque de transparence qui peut inciter à la méfiance. Cet inconvénient découle directement du caractère confidentiel de la procédure arbitrale. Une partie de la doctrine plaide d’ailleurs pour la possibilité de rendre les sentences arbitrales publiques moyennant un accord unanime des parties
  • Un autre inconvénient du recours à l’arbitrage réside dans l’absence de jurisprudence en la matière dont l’utilisation est pourtant fort utile lors de la survenance d’un litige
  • Les arbitres sont aussi parfois critiqués pour rendre des jugements de Salomon, autrement dit, des jugements dans lesquels l’arbitre partage les torts entre les parties, ce qui peut parfois obliger une partie à céder sans que ce ne soit forcément plus juste. D’où la nécessité de bien choisir les arbitres.

Les avantages et les inconvénients de l’insertion d’une clause compromissoire dans un contrat doivent être appréciés en fonction de chaque situation contractuelle, et les potentielles difficultés futures soumises à l’arbitrage doivent être déterminées en connaissance de cause, ce qui nécessite d’être bien conseillé.

Manuel Álvarez-Sala & Alexandra Gilles

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Cet article ne relève pas du conseil juridique

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