Pratiques anticoncurrentielles : les ententes illicites en Espagne

Le droit de la concurrence dans l’Union Européenne,  aux Etats-Unis ainsi qu’au Royaume Uni semblent avoir des objectifs identiques ou similaires en ce qui concerne les pratiques anticoncurrentielles, mais ces Etats agissent cependant différemment dans la manière de mettre en place la législation ainsi que face aux problématiques apparues. Les différences qui peuvent apparaitre dans des matières telles que la lutte contre les ententes (ou cartels) sont plus importantes que ce que l’on pourrait imaginer.

La loi espagnole concernant la libre concurrence15/2007 (Ley de Defensa de la competencia ou LDC) définit une entente comme un accord secret entre plusieurs concurrents dont l’objet est de fixer les prix, production ou quotas de ventes, l’attribution de marchés, y compris le truquage des offres, ou d’imposer des restrictions à l’exportation ou à l’importation.

La législation européenne concernant la lutte contre les ententes illicites se situe aux articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE). L’article 101 n’autorise pas les entreprises à conclure des accords anti-concurrentiels et l’Article 102 interdit aux entreprises d’abuser de leur position dominante sur le marché. La Commission Européenne est l’organisme d’enquête et elle dispose ainsi du pouvoir d’imposer des amendes si un comportement anti-concurrentiel était observé, ce pouvoir  est prévu par le règlement 1/2003. Suite à la conclusion d’une enquête sur une entente, la Commission Européenne pourra offrir un accord aux entreprises concernées. Afin  d’inciter les entreprises concernées à  parvenir plus rapidement à un accord, les entreprises recevront 10% de réduction en amendes afin d’éviter des litiges exorbitants. Toutes les décisions prises par la Commission peuvent être modifiées ou annulées par le Tribunal et la Cour de justice. En ce qui concerne les dommages, les victimes des comportements anti-concurrentiels ont généralement le droit de réclamer l’équivalent du préjudice qu’elles ont subi.

L’article 1 de la loi espagnole sur la libre concurrence15/2007 concerne la lutte contre les ententes ou cartels en Espagne. De plus, l’autorité espagnole de la concurrence applique l’article 101 du TFUE à presque tous les cas d’ententes,  puisque les cartels opérant en Espagne ou affectant ce même pays affectent habituellement et également le commerce entre les Etats membres. L’autorité de la concurrence en Espagne est la Commission Nationale des marchés et de la concurrence (Comisión Nacional de los Mercados y la Competencia). La CNMC détient le pouvoir de procéder à des visites surprises  dans les locaux de toute entreprise ou au domicile des salariés. Cependant, cela est seulement acceptable  lorsqu’il existe une raison bien fondée de croire que des documents ou toute autre preuve en relation avec l’entente dont il sera question pourront être découverts dans ces lieux. Concernant les dommages et intérêts aux victimes, la législation espagnole ne contient aucune disposition particulière en égard à ce type d’actions.

Aux Etats-Unis les objectifs sont, comme mentionné précédemment, les mêmes qu’au Royaume-Uni, mais la manière dont les problèmes sont traités, et les organes en charge, sont différents. L’organisme responsable de ces affaires est le Département de Justice, parmi lequel se trouve le Grand Jury. Le Grand Jury a le pouvoir de contraindre à la fois la production de documents et de témoignages. Tout comme l’Union européenne, les États-Unis fonctionnent sur un «programme de clémence» qui encourage le signalement de comportement anticoncurrentiel, en échange de l’immunité d’amendes ou condamnations. Contrairement à la législation européenne, les victimes de comportements anti-concurrentiels peuvent récupérer trois fois le montant des dommages qu’elles ont subi, ainsi que les honoraires d’avocats.

L’Autorité des États-Unis et la Communauté européenne collaborent sur les affaires de la politique de concurrence qui affectent les deux juridictions. Cette collaboration est basée sur l’Accord de courtoisie positive de 1998 et l’Accord de coopération de 1991.

Au Royaume-Uni, bien que faisant partie de l’Union européenne, c’est la Loi sur la concurrence de 1998 qui régit la règlementation sur les cartels et interdiction des ententes. Une partie de cette loi a été calquée sur l’article 101 du TFUE. Cette loi, tout comme les articles de l’UE, interdit les accords entre entreprises, les pratiques concertées et les décisions d’associations d’entreprises qui:

  • ont pour objet la prévention, restriction ou distorsion de concurrence au sein du Royaume-Uni.
  • Peuvent affecter les échanges au sein du Royaume-Uni.

En outre, la Loi sur la concurrence dispose qu’elle doit autant que possible être interprétée  au regard des règles européennes correspondantes. Compte tenu de tout ce qui précède, le droit européen est toujours prioritaire et les autorités britanniques sont habilitées à mettre en œuvre l’intégralité des articles 101 et 102 du TFUE.

Ainsi, l’Union Européenne et les Etats-Unis semblent être assez similaires en ce qui concerne la lutte contre les ententes illicites, excepté pour les instances judiciaires et les pouvoirs qu’elles possèdent, ainsi que le montant des dommages et intérêts.

Justine Matthys et Karl H. Lincke

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